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Nik Ta Race

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Sur la première page de son livre, Adrien Dénouette, critique cinéma de son état, reproduit une conversation de groupe avec ses amis.
– Pour une fois qu’un Arabe fait quelque chose de bien vous pourriez me prévenir.
Il évoque sa découverte de l’humoriste Mustapha El Atrassi, et comme les amis arabes qu’il chambre ainsi ne sont pas en sucre, ces derniers renchérissent :
– Oublie pas le Bataclan stp.
– Oublie pas le Volkswagen Touareg.
Si vous connaissez l’œuvre commise par Mustapha El Atrassi, vous saurez apprécier cette entrée idéalement appropriée, tout autant que le titre du livre Nik ta race. Une histoire du rire en France (Façonnages, 2023). Vous jubilerez sans doute aussi à l’idée de pouvoir enfin lire quelque chose sur cet artiste dont aucune presse ne dit rien et qui remplit pourtant n’importe quelle salle de spectacle en un claquement de doigts. Si vous faites partie de ce public fidèle, il y a également de fortes chances que vous ne soyez pas complètement étranger aux banlieues et notamment aux Arabes qui les peuplent ostensiblement. Peut-être même que vous en êtes, un Arabe. Pas de panique, ça arrive même aux meilleurs. La preuve.
De quoi donc Mustapha El Atrassi est-il le nom ? D’abord, de la fin des salamalecks. Fini les Jamel Debouzze et autres clowns de banlieue attendrissants, piégés dans les paradoxes d’une quête de reconnaissance et d’intégration. Fini les sketchs sur les banlieues à destination des bourgeois. Fini le divertissement par le rire. La séduction par le rire. La morale par le rire. Bref, fini la soupe. Mustapha El Atrassi, revenu de toutes les illusions républicaines et méritocratiques, a tué le « bon Arabe » en lui. Après une carrière à la télévision, il rompt tous ses contrats et marque entre lui et le personnage inoffensif qu’il a jusqu’ici incarné une frontière de feu. Sa véritable carrière commence ainsi : par un suicide.
La suite, ça se passe dans la tête bien faite d’Adrien Dénouette qui fabrique des connexions feu d’artifice, aussi redoutables que jubilatoires, en remontant la généalogie des sales gosses que la France – ce pays qui n’a pas toujours été chiant, rappelle-t-il – continue d’abattre symboliquement comme Gavroche sous la mitraille. Le tableau n’est néanmoins pas si noir. Partout, le rire résiste et menace d’éclater, surtout là où on rechigne spontanément à plonger les mains. Une loi se dégage : débrouillez-vous mais faites du sale.
Depuis, Mustapha El Atrassi a mis fin à sa carrière, au sommet de sa gloire. « Ce métier me bousille », a-t-il déclaré. Pour ceux qui arrivent hélas après la fête et jurent qu’on ne les y reprendra plus, suivez le regard d’Adrien Dénouette rivé sur la banlieue : c’est souvent là que ça se passe.
Louisa Yousfi
8 réponses à “Nik Ta Race”
Dés les 1er secondes ça parle d’ »arabe blanchi », on sent que pour la présentatrice il y a des « arabes » « plus » ou en tout cas « mieux » arabe que d’autre
Je souhaitais laisser ce message à Louisa Yousfi.
J’ai lu votre livre « Rester Barbare » et je dois vous dire que cet ouvrage a été pour moi une lecture « coup de poing »!
Ecrit incisif, sans concession.
Vraiment un grand merci!Merci pour cet entretien très intéressant… et déstabilisant… J’ai vu un peu plus de la moitié, et il y a un passage qui me dérange, c’est lorsque l’invité parle de cet humour noir qui détruit tout ce qui est sacré. Et il cite comme exemple l’humour macho d’El Atrassi et le poème de Baudelaire Assommons les pauvres. Je ne peux pas vraiment parler d’El Atrassi, puisque je ne connais pas ses spectacles, mais je ne vois pas très bien en quoi il est subversif de faire de grosses blagues sexuelles sur le dos des femmes. Ce type d’ »humour », des crétins le pratiquent tous les jours, quelle que soit leur origine ethnique ou leur classe sociale. En fait ce type d’ »humour » cadre assez bien avec le rire tel qu’il a été analysé par Bergson (auteur que cite l’invité), à savoir un rappel à l’ordre social, une humiliation destinée à remettre à leur place les gens qui sont tentés d’en sortir. Chez Baudelaire, c’est peut-être un peu plus subtil, parce qu’on a l’impression qu’il voudrait susciter de la violence chez les pauvres. Mais sinon, je ne vois pas trop ce qu’il y a de subversif, quand on est un bourgeois du XIXème siècle, à dire qu’on a le fantasme d’assommer un pauvre. Il me semble qu’un autre rire est possible, un rire qui s’attaque aux dominants et aux structures de domination sans pour autant tomber dans un prêchi-prêcha militant.
Réaction au dernier message de Bernejo :
– Vous confondez « Arabe » et « musulman ». Il y a des Arabes qui ne sont pas musulmans (mais chrétiens, agnostiques, athées, voire juifs…) et la plupart des musulmans du monde ne sont pas arabes.
– En quoi la religion musulmane serait-elle plus aliénante que, par exemple, le christianisme ? Et en quoi les musulmans seraient-ils moins capables que les chrétiens de comprendre ce que c’est que la laïcité ? Moi, j’ai l’impression que c’est vous qui n’avez pas compris ce que c’est que la laïcité, et que vous vous servez de ce terme comme d’un prétexte pour dire votre haine à l’égard de l’islam (voire des musulmans). On dirait du Marine Le Pen.Bonsoir Bernejo.
Vos interrogations rejoignent les miennes. Oui, on peut s’interroger sur la capacité des religions à faire de la place à la laîcité. Mais le problème du commentaire que vous avez laissé sur l’islam, c’est que vous n’avez pas présenté votre pensée sous la forme d’une interrogation : vous avez affirmé votre point de vue de manière très catégorique. Le problème, c’est aussi que vous ne dites pas pourquoi l’islam serait davantage incompatible avec la laïcité que n’importe quelle religion. Si vous argumentiez, une controverse serait éventuellement possible. Mais là, c’est plutôt vous qui pratiquez l’attaque et le discrédit (en l’occurrence sur l’islam et les musulmans). Enfin, je ne sais pas trop pourquoi vous avez abordé ce sujet à propos de cette émission.
Avec l’émission sur l’art de Ben votre intervention est la pire toutes les propositions de la chaîne .. pouah !!*
Le melon qu’il a, le mec…
Et le « sale » comme ultime étalon de la création… on dirait du Bastien Vivès.
À part ça, plein de choses intéressantes et instructives au milieu (oui oui).
❤❤❤ merci 🙂
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