Réflexions sur la question juive
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Bruno Karsenti
Laura Raim
Se peut-il qu’il y ait encore quelque chose comme une « question juive » ? L’hypothèse m’interpelle, mais déclenche en moi toutes sortes de sonnettes d’alarme. J’ai tendance à m’interdire de m’intéresser de trop près aux sujets liés au judaïsme et à la judaïté. Par pudeur, par crainte de tomber dans une fascination communautariste et nombriliste autour de l’éternelle et insoluble question de l’« identité » juive : comment se fait-il que des gens, comme moi, se disent juifs alors qu’ils ne sont ni croyants ni pratiquants. Existe-t-il vraiment une « culture » juive ? Un « peuple » juif ? Ne devrais-je pas imiter la démarche de l’historien israélien Shlomo Sand, auteur d’un ouvrage intitulé Comment j’ai cessé d’être juif et rester concentrée sur la plus universelle question sociale ?
Avec son livre, La question juive des modernes. Philosophie de l’émancipation ( Puf, 2017), le philosophe Bruno Karsenti m’ouvre la voie que je cherchais : celle qui saisit la question juive non comme objet mais comme outil d’investigation pour interroger la modernité en tant que projet d'émancipation politique pour tous, ses promesses, ses angles morts, ses contradictions. C’est dans cette optique que nous avons évoqué des sujets aussi divers que l’actualité radicale de la Loi de Moïse, les origines « positives » de l’antisémitisme du XIXeme siècle et le sionisme « de l’exil » imaginé par l’écrivain dreyfusard Bernard Lazare.
Laura RAIM