Dans le QG du macronisme
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Romaric Godin
Laura Raim
On a beaucoup entendu les éditorialistes gloser sur l’insaisissable nature du macronisme. A-t-on affaire à un « giscardisme » ? Ou bien serait-on en présence d’un « jeunisme », un « européisme », un « romantisme » ou encore un narcissisme? s’interroge le journal l’Opinion. Frédéric Lordon avait quant à lui défendu, non sans arguments, l’hypothèse d’un « gorafisme ». Romaric Godin vient mettre de l’ordre dans tout ce bazar.
Dans son ouvrage La guerre sociale en France, Aux sources économiques de la démocratie autoritaire, ( La découverte ), le journaliste de Mediapart retrace la généalogie de la doctrine néolibérale à laquelle le président de la République entend enfin convertir entièrement la France. Il rappelle les théories (pseudo)scientifiques sur lesquelles Macron s’appuie et décortique la stratégie — inédite par rapport à Hollande et Sarkozy — qu’il tente de mettre en oeuvre pour y arriver. Que la politique de Macron soit néolibérale et autoritaire n’aura pas échappé à grand monde, mais Romaric Godin a l’art de mettre en récit les grandes étapes et moments de bifurcation de cette Histoire. Nourri par les réflexions complexes de penseurs que l’on apprécie beaucoup à Hors-Série, ( Bruno Amable, Grégoire Chamayou…), le journaliste fournit une synthèse concise et percutante de ces travaux et donne les clés pour saisir la place singulière du macronisme dans l’histoire du capitalisme français.
On ne sort pas optimistes de La guerre sociale en France, mais au moins on comprend mieux à la fois les ressorts du « projet » macroniste, les raisons historiques pour lesquels le corps social y a si longtemps résisté — et continue de le faire, aujourd'hui sous la bannière des Gilet jaunes, et pourquoi, face à cette résistance, le projet macroniste devait prendre le tour autoritaire qu’on lui connaît aujourd’hui.
Laura RAIM