Vive la dette !
Aux Ressources
Arthur Jatteau et Alban Pellegris
Laura Raim
« À la sortie de cette crise, il faudra faire des efforts, le redressement sera long et il passera par le désendettement du pays », avertissait en avril dernier le ministre de l’Économie Bruno Le Maire, qui ne cache pas sa volonté de reprendre sans tarder la « réforme » des retraites. On le sait, le « poids » de la dette publique sert depuis longtemps aux dirigeants à justifier leurs politiques austéritaires.
D’où l’importance d’aiguiser nos arguments pour réfuter cette injonction au désendettement et démontrer que la dette publique n’est ni un fardeau pour les génération futures, ni un problème en soi.
La dette publique. Précis d’économie citoyenne (Seuil) nous fournit de précieuses munitions dans le bras de fer à venir. L’ouvrage est écrit par cinq membres des Economistes atterrés, collectif d’économistes hétérodoxes créé en 2011, dans le contexte de la "crise de la dette" européenne. A l’époque, déjà, il fallait déconstruire les idées reçues autour de "l'insoutenabilité" de la dette et de la nécessité de gérer les finances publiques "en bon père de famille"...
Arthur Jatteau de l’Université de Lille et Alban Pellegris de l’université de Rennes nous rappellent ainsi pourquoi l’endettement public est utile, à condition d’y recourir à bon escient et de repenser son financement, notamment de manière à libérer les Etats de la dépendance aux marchés financiers, érigés par la construction européenne en instance disciplinante sur les politiques économiques.
Oure ces piqûres de rappel salutaires, les deux co-auteurs nous aident à y voir plus clair sur le vif débat qui s’est engagé ces derniers mois sur la pertinence stratégique de se battre pour l’annulation de la "dette covid" détenue par la BCE. Une controverse compliquée qui a l’originalité d’opposer les économistes de gauche entre eux et qui pose la question suivante : si la dette publique n'est vraiment pas un problème, pourquoi serait-il urgent de l'annuler ?
Laura RAIM