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Alger, capitale de la révolution

Dans le Texte

Elaine Mokhtefi

 (Émission conçue et présentée par Louisa Yousfi)

 « Les musulmans vont en pèlerinage à la Mecque, les chrétiens au Vatican et les mouvements de libération à Alger », disait le révolutionnaire guinéen Amilcar Cabral. Titre de gloire pour des générations d’Algériens qui ont connu l’âge d’or de la diplomatie algérienne entre 1960 et 1970, la citation fera date. Et il y a de quoi.
Après 132 années de colonisation et une guerre de libération acharnée et victorieuse, la jeune Algérie entend mener une politique de soutien actif à tous les peuples colonisés et victimes de l’impérialisme et du racisme, se hissant ainsi comme symbole incontournable de l'émancipation des damnés de la terre, et pivot central des luttes du tiers-monde et du bloc des "non-alignés". Dès l’indépendance, la ville d’Alger accueille ainsi pas moins de 27 mouvements révolutionnaires venus du monde entier : le Black Panthers Party, l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), le gouvernement révolutionnaire provisoire du Vietnam du Sud (GRP), le Congrès national africain (ANC)… et l’on peut y croiser au hasard des ruelles de la casbah des figures historiques tels que Che Guevara, Nelson Mandela, Yasser Arafat, Eldridge et Kathleen Cleaver, Nina Simone, Timothy Leary…


Jusqu’ici cette histoire était connue. Peu, cependant, ont pu lui conférer la densité d'une passion révolutionnaire vécue dans la chair ainsi que la raconte Elaine Mokhtefi dans son livre-mémoire Alger, capitale de la révolution (La Fabrique) où elle revient sur cette vie exceptionnelle qu’elle a menée en plein cœur des luttes anticoloniales. À travers son histoire personnelle – celle d’une jeune américaine juive fraîchement débarquée en France qui se jette corps et âme dans la lutte pour l’indépendance de l’Algérie avant de devenir une pièce maîtresse dans la coordination et la jonction des différentes luttes de libération à travers le monde – Elaine Mokhtefi donne un nouveau souffle à cette époque fascinante où la face du monde a été métamorphosée par le soulèvement et les idéaux des peuples opprimés.

Entremêlant la grande histoire avec la petite, les événements avec les anecdotes, le récit d’Elaine Mokhtefi est un véritable document d’archives raconté comme un récit d’aventures. Mais il est surtout un chant d’amour dédié à l’Algérie, aux femmes et aux hommes qui l’ont entourée dans ce pays et qui ont, toutes et tous, d’une manière ou d’une autre, donné leur vie pour un idéal de justice, d’égalité et de dignité.

À l’heure où le peuple algérien renoue avec sa tradition révolutionnaire en descendant dans les rues chaque vendredi par millions pour s’opposer fermement au gouvernement, cet hommage, porté par celle qui à 92 ans semble n’avoir rien perdu de sa passion, n'en finit pas d’émouvoir. Parole d'Algérienne. 

« Mon histoire avec l’Algérie ne se terminera jamais. Elle a envahi et occupé mon être durant toutes ces années. J’étais parmi les rêveurs qui y sont allés pour construire un monde nouveau. J’ai cru en le peuple algérien, en son cœur et en son âme, à travers la guerre et dans la reconstruction du pays martyrisé. J’ai reçu affection et reconnaissance, en plus d’un chez moi. Je n’ai jamais rencontré un Algérien qui ne fût pas meurtri par tant d’injustice, tant de misère, encore irrésolues. (…) À chaque rassemblement, je cherche les Algériens, jeunes et vieux ; ce sont des gens qui ont le sens du passé. Je replonge en arrière avec eux et me souviens. Je retrouve ma jeunesse ».

Louisa Yousfi 

 

Dans le Texte , émission publiée le 08/06/2019
Durée de l'émission : 67 minutes

Regardez un extrait de l'émission