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De Charlie au charlisme

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Comment passe-t-on de l’anarchisme au sarko-macronisme ? De l’anticléricalisme à l’islamophobie ? De l’humour ciblant ceux d’en haut aux blagues visant ceux d’en bas ? De l’antimilitarisme à l’atlantisme ? Du pacifisme à la guerre contre l’axe du mal ? De la marginalité politique aux plus haut sommets de l’Etat ? De critiques acerbes du pouvoir au rôle de bouffon du roi ? Vastes questions, qu’on peut résumer simplement : comment se prépare, s’opère et se repère un reniement politique ? L’histoire de Charlie Hebdo constitue un exemple chimiquement pur de ce type de reniement. Les choses se firent progressivement, par étapes, au fil du demi-siècle d’existence du journal. Et les mécanismes en jeu concernent davantage des structures collectives, une humeur ambiante, une configuration idéologique nationale, que des individus, lesquels ne sont jamais que la cristallisation personnelle de dynamiques qui les dépassent.
Daniel Schneidermann, journaliste et fondateur d’Arrêt sur images, auquel Hors-Série doit tant, a aimé passionnément le Charlie des origines, créé en 1970 par Cavanna et Choron pour remplacer la version hebdomadaire du magazine Hara Kiri. Il l’a aimé autant qu’il fut peiné, trente ans plus tard, par la lente dérive réactionnaire et islamophobe du journal, désormais repris et relancé par un certain Philippe Val. Cette dérive, Daniel la documente et l’analyse avec érudition et passion dans le livre qu’il vient de publier aux éditions du Seuil, Le charlisme. Raconté à ceux qui ont jadis aimé Charlie. Que ce livre, paru il y a un mois, soit jusqu’ici passé sous le radar des grands médias, est peut-être un signe supplémentaire de la façon dont le charlisme – la perversion de l’esprit Charlie – est parvenu à imposer son hégémonie dans le champ médiatique. Est-il nécessaire de citer des noms (allez : Raphaël Enthoven, Caroline Fourest, Sophia Aram…) et de rappeler la surface médiatique de chacun d’eux ?
Au fond, le charlisme va bien au-delà de Charlie Hebdo. Il désigne une mutation majeure du paysage intellectuel et humoristique français, où la critique des dominants s’efface au profit de la haine des dominés, où la liberté d’expression accouche d’une obligation d’offenser les musulmans, où la quête de vengeance se substitue à la soif de justice et où la force subversive de l’humour se mue en moqueries et humiliations qui renforcent les hiérarchies établies. Tout cela valait bien une émission.
Bon visionnage !
Manuel CERVERA-MARZAL
10 réponses à “De Charlie au charlisme”
https://www.arretsurimages.net/articles/charlie-hebdo-il-y-a-dix-ans-sur-le-plateau-dasi
Il en est fait mention dans l’entretien. A propos du mot « ennemi » et les attentats « Charlie » autour de 40 minutes. Super intéressant par ce que cela prouve qu’on peut réfléchir même pendant les évènements (emission enregistrée le vendredi 9 matin) quand les frères Kouachi sont à l’imprimerie de Dammartin-en-Goële et que l’on ne sait rien de la prise d’otage de l’Hyper Cacher. Belle clairvoyance de Judith Bernard. Voir aussi un peu avant (vers les 10 minutes).
Des intervenants de l’entretien d’il y 10 ans pointait déjà les dérives du Charlie de Val . On prononce même le mot néo-con (servateurs).
Ce sont les prémices du livre de Daniel Schneidermann, en fait.Merci pour cette émission.
Je n’ai pas (encore) lu le livre de DS. Je ne sais pas si il y évoque l’éviction de Siné.
Perso, c’est ce qui me choque le plus chez Charlie Hebdo. Que cet hebdo (auquel je continue d’être abonné) puisse être considéré comme le parangon de la liberté d’expression après cette censure condamnée aux prud’hommes…Vers 17 minutes, il n’est pas exact de parler d’ambiguïté en ce qui concerne la couverture de Charlie “C’est dur d’être aimé par des cons”. Sur la gauche de la page figure la mention “Mahomet débordé par les intégristes”. Aucune ambiguïté. On ne parle pas ici de “tous les musulmans”.
Bien vu Emmanuel , Siné est le grand oublié de cet entretien qui aurait peut-être permis de parler du sionisme dans tous ses états. Val est parti avec son collègue Font des adolescentes vers le fascisme. Question est-ce que l’US AID aurait mis un peu d’argent dans l’affaire Charlie Hebdo?
Quand l’affaire de Meurice est évoquée , on évite de rappeler le pourquoi…Entretien de connivence où MCM ne maitrise guère le sujet. Que DS ne se soit pas rendu compte que « le monde » est atlantiste depuis toujours montre un des problèmes fondamentaux du « journalisme » en fRance.Il est vrai que la critique était plus aisée , il y a 40 ans et que, depuis, les culs serrés ont pris le pouvoir avec la droite rance qui contrôle les médias . Quant aux musulmans , ce sont comme les noirs des sous hommes pour une grande partie des français qui sont restés racistes jusqu’au bout des ongles : le pire reste à venir pour tous ces petits blancs suprémacistes qui se prétendent civilisés et qui sont de plus en plus médiocres dans tous les domaines.La une de Charlie ne comporte aucune ambiguite car un encart dit « Mahomet débordé par les intégristes » ce qui éclaire la phrase prononcée par Mahomet « c’est dur d’être aimé par des cons » où les cons sont clairement les intégristes.
J’ai du mal à comprendre pourquoi vous faites de ce dessin une lecture partielle qui m’apparaît partiale.J’ai lu Charlie chaque semaine depuis 2006: aucune islamophobie, un message antiraciste très fort, jusqu’à 2015 en tout cas.
Pour moi aussi en 2015 des,amis,sont morts.
Je ne le lis plus car Charlie a été l’un des premiers journaux à faire un lien d’égalité entre Le Pen et Mélenchon mélangeant tout, qualifiant la FI d’antisemitisme et soutenant de fait la Macronie et l’extrême droitisation de la politique.Bonjour Je conseille la lecture de « Mohicans » de Denis Robert paru chez Juilliard il y a 9 ans.
Une autre hypothèse du NON glissemnnt à droite de DS : les jeuuuuunes. Il me semble qu’ASI est une plate-forme de lancement de journalistes. Ce sont donc beaucoup de jeunes qui s’y succèdent et plutôt des personnes critiques (des médias), des progressistes, pas vraiment des étudiants en droits d’Assas.
Ce qui me console ce sont les convictions de nos deux intervenants qui semblent intactes mais ce qui me désolent c est que le monde qui semble se dérober sous leurs pieds ne les fassent pas « hurler »
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