La Commune est vivante !

avec Ludivine BANTIGNY et Stathis KOUVÉLAKIS
publiée le
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animée par Manuel CERVERA-MARZAL

Paris, mars 1871. Le peuple se soulève contre l’Assemblée nationale à majorité monarchiste. Pour la première fois, le pouvoir politique est entre les mains des travailleuses et des travailleurs. Quelques mois plus tôt, suite à sa défaite militaire contre la Prusse, l’Empire de Louis-Napoléon Bonaparte s’est effondré. Dans la foulée, le gouvernement républicain d’Adolphe Thiers transfère l’Assemblée nationale à Versailles et décide, le 18 mars, de désarmer la Garde nationale, essentiellement composée d’ouvriers et d’artisans parisiens. Ces derniers refusent de céder et l’armée fraternise avec eux. Des barricades s’élèvent dans tout Paris. Le 28 mars, la Commune de Paris est proclamée. L’insurrection sera violemment écrasée au cours de la Semaine sanglante, qui s’achève le 28 mai. Mais, durant deux mois qui valent deux siècles, les communeux et communeuses auront donné à voir les prémices d’un monde libéré de l’exploitation et de l’Etat.

Un siècle et demi plus tard, les cendres restent chaudes. Pierre Nora, historien « officiel » de la bourgeoisie française, déclarait récemment sur France Inter : « Commémorer Napoléon, oui ! La Commune, non ! » De crainte que cette révolution populaire, soigneusement écartée des programmes scolaires, ne donnent des idées à certains ? Je me souviens d’une pancarte, en 2019, dans une manifestation d’enseignants : « Moins de Jean-Michel, plus de Louise Michel ». Et en 2016, durant Nuit debout, de la place de la République qu’un graffiti avait renommé « Place de la Commune ». La mémoire vivante du Paris insurgé se lit aussi dans l’œuvre d’un intellectuel tel que Murray Bookchin et, plus encore, dans les luttes autogestionnaires menées actuellement au Rojava et au Chiapas.

Pour celles et ceux qui aspirent à un changement radical de société, la Commune reste ainsi un laboratoire politique d’une richesse inestimable. Sur des questions aussi fondamentales que la démocratie, l’organisation du travail, l’éducation, les arts, la culture, nous avons tant à apprendre de cette expérience. Pour s’en convaincre, je reçois aujourd’hui l’historienne Ludivine Bantigny et le philosophe Stathis Kouvélakis. Ces deux intellectuels publient chacun un ouvrage passionnant sur le sujet. Dans Sur la Commune de Paris (Editions sociales), Stathis Kouvelakis montre combien l’insurrection parisienne a eu un rôle déterminant sur la pensée de Marx et dans l’histoire du mouvement ouvrier. Dans La Commune au présent (La Découverte), Ludivine Bantigny s’adresse, par-delà le temps, aux héroïnes anonymes et connues de la Commune, afin de montrer combien leur combat pour la dignité résonne peut alimenter nos espoirs et nos projets.

Bon visionnage !

Manuel Cervera-Marzal

 

Bibliographie indicative des références mentionnées durant l’entretien:

Auguste Blanqui, Maintenant, il faut des armes (textes choisis et présentés, éditions La Fabrique)

Julien Chuzeville, Leo Frankel (éditions Libertalia)

Paul Lafargue, Le droit à la paresse, 1880

Gustave Lefrançais, Souvenirs d’un révolutionnaire, 1902

André Leo, La Guerre sociale, 1871

Karl Marx, Les luttes de classes en France, 1850

Karl Marx et Friedrich Engels, Inventer l’incconu (éditions La Fabrique)

Louise Michel, La Commune. Histoire et souvenirs, 1898

Pierre-Joseph Proudhon, Qu’est-ce que la propriété?, 1841

Floréal Romeo, Dans le texte, novembre 2019

Eugène Varlin, Ouvrier-relieur 1839-1871 (textes choisis et présentés, éditions Libertalia)

 

Durée 91 min.

5 réponses à “La Commune est vivante !”

  1. Olivier Percevaut

    Super entretien, comme toujours, Hors Serie je vous adore. Je me pose une vraie question suite à cet entretien. Dans quelle mesure peut-on appeler « fraternisation » une situation dans laquelle des forces armées évaluent bien que si elles ont à désarmer le peuple de Paris, celui ci peut donc à égale mesure s’en prendre à leurs vies? Autrement dit, les conditions de rapport de force ne sont elles pas réunies structurellement parlant pour cette « fraternisation »? Et donc, le mot fraternisation ne révèle t’il pas tout à la fois… une espérance un peu naïve autant qu’il cache l’enjeu véritable : on ne fait sien les intérêts des autres que lorsqu’on comprend qu’il en va aussi de notre intérêt? Fraternisation fait il écran à « capitulation » ? Au plus prosaïque « Retrait des troupes »? Ou simple « suspension, de l’action militaire? Je crois que je n’en sais pas assez sur le contexte de l’époque pour savoir la pertinence de ces questions… Olivier P.

  2. titou

    Entretien intéressant , forcément trop court, on a senti Manuel en retrait. La Commune était trahie à la fois par les armées de Bismarck et des Versaillais, mais aussi par leur délégué aux finances qui s’est fait roulé dans la farine par le représentant de la Banque de France. Si les expériences tentées ont été formidables pour l’époque, il manquait la réflexion géopolitique et l’argent!
    On peut réécouter avec plaisir , la Commune d’ Henri Guillemin pour saisir un peu mieux cette histoire que notre oligarchie bourgeoise versaillaise d’aujourd’hui veut nous faire oublier.

  3. Abracadabra

    Concernant les « souvenirs » de Pierre Nora: Pourquoi Pompidou n’était pas au Mur des Fédérés lors du centenaire (30:30) :

    https://parolesdhistoire.fr/index.php/2021/03/17/185-commemorer-la-commune-avec-eric-fournier/

  4. JP77

    Thiers, premier collabo français.

  5. Nicolas V

    Il me semble qu’il y a une erreur dans le texte et l’image affichés à 12 minutes. William Morris n’était pas du tout « commandant en chef de l’armée du Rhin ». Et l’image semble être celle de François Achille Bazaine, qui n’a rien à voir avec William Morris.

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