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La Matrice

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Pourquoi faudrait-il toujours commencer quelque part, quand on pourrait commencer par tout ? C’est forte de cette sagesse improvisée que l’émission Dans le Mythe a choisi de faire son grand retour, avec un mastodonte aux proportions franchement désarmantes : la matrice. Mais qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire ? Et en quoi, ce mot massivement polysémique, serait-il un « mythe » ?
On aurait tort de répondre par l’évidence. Car rien n’est moins simple, en effet, que de vouloir classer ce qui prétend tout ordonner, tout englober, tout orchestrer. La Matrice, ça veut dire « tout ». Rien de moins. Désarmant ? On avait prévenu.
Et si on regardait le colosse en face et qu’on tentait avec nos petits bras d’humains trop humains d’escalader sur ses épaules pour jouir d’une vue imprenable sur le monde, le monde tel que rêvé par les métaphysiciens, le monde-en soi ? Nul besoin d’un vertige de plus pour comprendre que la matrice n’est pas un mythe comme les autres. Elle est un hyper-mythe. Le mythe des mythes. Celle qui en incarne le mieux le principe fondateur. Car s’il faut se figurer le mythe à la manière d’un kaléidoscope qui puiserait ses sources de lumière dans tous les univers culturels et hétérogènes d’une société, les rendant – c’est là sa magie –, compatibles et équivalents, le mythe c’est donc cette tentative, vieille comme le monde, de mettre de l’ordre dans toutes les expériences confuses et ébouriffées que les humains font de la vie ; c’est le désir d’y trouver un sens profond et intime, l’ambition de contenir l’infinie complexité des choses dans un tout cohérent. Autrement dit, c’est cette foi en une matrice, en cette extériorité radicale vers laquelle tout converge sans l’atteindre tout à fait. « Tout est relié » : ainsi se formule le mythe matriciel, se déployant de l’Antiquité à nos jours, à travers livres saints, philosophie, mathématiques, littérature et cinéma. Bien sûr, l’idée ne nous tombe pas du ciel et il faut rendre à Matrix ce qui est à Matrix, œuvre protéiforme, inépuisable de sens, symbole d’une génération, à laquelle cette émission doit son inspiration principale.
Ce n’en était pas moins ambitieux. On parlera pêle-mêle de pythagoriciens, de gnose, de métaphysique, de système binaire informatique, de réalité virtuelle… Pas de quoi se laisser impressionner non ? Allons, on parlera aussi de kung-fu, de cookies, de rêves emboités, d’anticapitalisme, de télé-réalité, de complotisme, de pilule rouge et même – qui oserait y résister ? – d’amour.
Avec notre invité Tristan Garcia, philosophe et romancier, Rafik Djoumi et moi-même avons ainsi, en toute simplicité, ambitionné de parler de tout. Pour des raisons évidentes, nous ne sommes pas parvenus à en faire le tour. Mais le jeu valait bien quelques minutes de débord dans notre durée d’émission habituelle… à défaut de quelques siècles.
Louisa Yousfi
11 réponses à “La Matrice”
Bien que je sois une fidèle inconditionnelle de la manière dont Judith mène ses entretiens, je salue sa capacité à passer le relai : bienvenue à la nouvelle co-équipière !
Et merci pour le culot d’affronter un sujet aussi ambitieux.
Captivant.
(Je me doutais que Rafik Djoumi allait faire un petit détour – pertinent – par Avatar ^^).Cette émission est un bijou culturel pour néophythe !!!
On en oublierai presque le charme étincelant de Luisa quand elle parle de l’Aamouur …
Merci toujours à Rafik pour son inépuisable érudition (comme une matrice à la limite d’éclipser l’invité)
Je pense qu’on a trouvé son nickname : « Rafik the Matrix »@rm : certes, mais dans le contexte, il s’agit toujours bien des frères Wachowski(s)^^(puisque transition de genre postérieure à Matrix)
@rm : je comprends parfaitement ce que vous dites, mais votre (premier) commentaire lapidaire semblait sous-entendre que les intervenants méritaient d’être « informés » de ce détail grâce à vous (comme s’il était imaginable que Rafik par exemple ne soit pas au courant).
Dans le cadre de cette émission, les commentaires renvoient à un moment chronologique où les créateurs étaient bien « les frères Wachowski(s) ». Sinon, les animateurs de l’émission auraient dû faire leur biographie – tout le monde n’est pas informé de leur vie privée – , ce qui certes n’était pas impossible, mais n’était pas le sujet pour cette fois.Et ceci ne me parait pas contredire vos remarques.
@rm : j’ai déjà entendu ces précisions dans la bouche de Rafik Djoumi, j’en suis sûre… Probablement dans l’émission consacrée aux Anges de la Vengeance (pas le temps de vérifier), puisque à ce moment là, chronologiquement, ils/elles sont scénaristes de V for Vendetta. (Andy/Lana)
Ce n’est pas que « ce qui a été vaut pour toujours », c’est que dans la mémoire collective – tout le monde n’est pas hyper cinéphile -, « Matrix = Frères Wachowski(s) ». Comme une sorte de marque en somme.Mais bon. Soit.
Un nouveau Dans Le Mythe avec Rafik Djoumi de près de 2h ? J’achète ! On n’attend pas les sommets de l’épisode consacré aux sorcières avec Pacôme Thiellement mais on n’est pas loin. J’en voudrais un par semaine !
Voudriez vous bien nous communiquer l’ensemble des titres des films présentés en extraits ?
Merci.Assez d’accord avec lalberio. En regardant, je me suis demandé à quel public s’adressait cette émission. Certains passages ont pu être intéressants mais je me suis principalement senti exclu, regardant une discussion entre amis causant le même langage. Parfois par exemple, ça vaudrait le coup de prendre le temps de reposer des définitions, des concepts… histoire d’intégrer les gens comme moi qui n’ont qu’un petit bagage philosophique (entre autres).
Je sais que ça ne répond pas à toutes les questions mais voici un extrait de mes notes concernant les références (3 rubriques : films, séries, livres).
Hope it helps.Films :
Trilogie Matrix, Washowski :
– Matrix, 1999
– Matrix Reloaded, 2003
– Matrix Revolutions, 2003
Pi, Darren Aronofsky, 1998
The Truman Show, Peter Weir, 1998
Total Recall, Paul Verhoeven, 1990
Dark City, Alex Proyas, 1998
Passé virtuel, Josef Rusnak, 1999
Ghost in the Shell, Mamoru Oshii, 1995
L’Homme de la rue (Meet John Doe), Frank Capra, 1941
Trilogie Le seigneur des anneaux, Peter Jackson :
– La Communauté de l’anneau (2001)
– Les Deux Tours (2002)
– Le Retour du roi (2003)
La Guerre des étoiles (Star Wars), Georges Lucas, 1977
Le Procès, Orson Welles, 1962
Brazil, Terry Gilliam, 1985
Avatar, James Cameron, 2009
Fight Club, David Fincher, 1999
Snowpiercer, le transperceneige, Joon-Ho Bong, 2013
Network, main basse sur la télévision, Sydney Lumet, 1976
Le gouffre aux chimères, Billy Wilder, 1951
Interstellar, Christopher Nolan, 2014
Contact, Robert Zemeckis, 1997Séries
La quatrième dimension (The Twilight zone), Rod Serling, 1959-1964
Le prisonnier (The prisoner), George Markstein, Patrick McGoohan, 1967-1968
Neon genesis Evangelion, Hideaki Anno, 1995-1996
Animatrix, Washowski, 2003
Black Mirror, Charlie Brooker, 2011-Livres
Simulacron 3, Daniel F. Galouye, 1964
Les lettres du Yage, Allen Ginsberg et William Burroughs, 1963
La vie est un songe, Pedro Calderón de la Barca, 1635
L’illusion comique, Pierre Corneille, 1635
Simulacres et simulation, Jean Baudrillard, 1981
Les Aventures d’Alice au pays des merveilles, Lewis Carroll, nom de plume de Charles Lutwidge Dodgson, 1865
Le héros aux mille et un visages (The hero with a thousand faces), Joseph Campbell, 1949
Les employés, Siegfried Kracauer, 1929
1984, George Orwell, 1949
La dialectique de la Raison, Max Horkheimer et Theodor W. Adorno, 1944
Le brave soldat ChvéÏk, Jaroslav Hasek, 1923
L’éthique, Spinoza, 1677
La République, Platon, environ 380 avant J.C
La victoire des sans Roi, Pacôme Thiellement, 2017
Écrits gnostiques (La bibliothèque de Nag Hammadi), Collectif, 2007
Gargantua, Rabelais, 1534
Rapport minoritaire (Minority Report), Philip K. Dick, 1956
Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? (renommé Blade Runner après la sortie du film), Philip K. Dick, 1968
L’obsolescence de l’homme, Günther Anders, 1956
La société du spectacle, Guy Debord, 1967
Imperium, Frédéric Lordon, 2015
Les aventures de Télémaque, Fénélon, 1699
Phèdre, Racine, 1677Un régal pour l’esprit ! Je n’ai pas tout regardé, me réservant une deuxième mi-temps pour digérer la première, car c’est roboratif. Mais quel plaisr de parcourir ce sujet à travers le cinéma et la littérature ! du grand art audiovisuel. De plus, on sent que vous avez passé la vitesse supérieure par rapport aux analyses ciné de « dans le film » qui étaient pertinentes, mais nettement plus plan-plan. En plus, toutes les références de livres et de films sont un trésor pour les soirées d’hiver… MERCI !
… comme j’ai pas encore tout vu je devrais me taire mais quid de la perception d’une réalité limitée dans le cinéma des débuts de Christopher Nolan avec « following » et « mémento » ?
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