Le principe démocratie

avec Albert OGIEN
publiée le
animée par Judith BERNARD

Albert Ogien est sociologue, Sandra Laugier est philosophe ; en 2010 ils avaient déjà publié ensemble Pourquoi désobéir en démocratie ?, qui interrogeait le sens politique de la désobéissance civile. Ils publient aujourd’hui, à nouveau ensemble, Le principe Démocratie, enquête sur les nouvelles formes du politique (La découverte, 2014). Le livre est une formidable analyse des mouvements politiques qui ont animé la planète à partir de 2011 – Printemps arabe, Indignés du 15 de mayo, Occupy Wall Street, Printemps d’Erable… : au delà de leurs indiscutables différences locales, ces mobilisations ont fait apparaître une nouvelle forme d’action politique, émergeant à partir de la société civile sans passer par les institutions traditionnelles de la politique, et posant au coeur de leur méthode d’action et de leur revendication politique le principe de la démocratie. C’est une nouvelle conscience civique qui se fait jour ici, aux quatre coins de la planète à peu près au même moment, une exigence inédite susceptible de réinventer le politique et peut-être aussi de remettre l’Histoire en mouvement – et en tout cas les sciences humaines. Car, pour comprendre les formes et les enjeux de ces mouvements, il faut mobiliser de nouveaux paradigmes philosophiques et sociologiques, en une sorte de révolution intellectuelle extrêmement roborative… En l’absence de Sandra Laugier, qui n’était pas disponible pour l’entretien, Albert Ogien nous livre ici de très passionnants objets de réflexion : plus d’une heure de conversation de philosophie politique, étroitement connectée à l’actualité du monde – un pur régal.

Judith BERNARD

Durée 85 min.
  • Commentaires

7 réponses à “Le principe démocratie”

  1. Alain Godet

    Judith Bernard mène vraiment ses émissions, je trouve, avec passion et talent. Elle relance toujours adéquatement, creuse là où il faut, montre un intérêt assez clair pour les questions traitées tout en sachant garder du recul et se faire parfois l’avocat du diable. Ces « Dans le texte » sont vraiment un régal. Bonne continuation !

  2. Marianne Thomas

    Merci pour cette émission passionnante. À un moment vous opposez l’élection et le tirage au sort pour la constitution d’une assemblée constituante. Étienne Chouard dans l’émission «aux sources» si mes souvenirs sont bons, proposait un mixage des deux que je trouvais intéressant : on élisait un panel, dont on retirait les X% les plus haut et les plus bas et on faisait ensuite un tirage au sort dans ce panel. Je ne sais pas si cette possibilité est évoqué dans le mouvement pour la 6ème république mais je la trouvais intéressante.
    Je ne connaissais pas le livre «Le principe démocratie» mais ça m’a donné envie de le lire. Cela fera un très bon cadeau de Noel 🙂
    Bonne continuation
    Mlle Ellute.

  3. Papriko

    Je n’ai pas aimé cet entretien.
    Le discours d’Albert Ogien est souvent tortueux et obscur. On se demande plus d’une fois où il va.
    Une chose est étrange, dans cet entretien, ce sont … les surprises de Judith. A plusieurs reprises, elle est manifestement interloquée par ce qu’elle entend. Comme on ne peut pas la soupçonner d’avoir mal préparé son entretien et d’avoir mal lu le bouquin d’Ogien, on ne peut que penser que ce que dit Ogien n’est pas dans son bouquin et qu’il s’éloigne de son sujet. Plus précisément (consciemment ou non, délibérément on non), il refuse de dialoguer avec Judith et refuse ses questions. C’est horripilant.
    J’aimerais donner des exemples de ce que j’affirme, mais pour cela, il me faudrait visionner à nouveau l’entretien et je n’en ai vraiment pas envie. Je refuse d’écouter quelqu’un qui ne respecte pas son interlocutrice et, à travers elle, son public. Je dois dire à cette occasion que je suis très admiratif devant l’indulgence de Judith devant certains de ses ses invités.
    Tout de même je cite de mémoire quelques étranges propos :
    1 – Albert Ogien parle à un moment d’un « effet pervers du capitalisme ». Cette formule est absurde. On ne peut parler d’un effet pervers d’un mécanisme ou d’une institution que si leur but premier est vertueux. Par exemple: l’assèchement des marécages a permis d’éradiquer la malaria; un effet pervers de ces travaux a été que les oiseaux migrateurs ont déserté la région. On se demande quel peut être le but premier vertueux du capitalisme…
    2 – Albert Ogien affirme que « Durkheim a inventé la sociologie pour … » (je ne me souviens plus exactement de ce qui suit, mais en substance que c’est pour s’opposer à certains affirmations des religions en place). Cette formulation est choquante. Même si on admet que « Durkheim a inventé la sociologie », on ne peut pas imaginer qu’il a développé cette science pour des raisons autres que scientifiques, un chercheur (pardon pour ce terme anachronique) ne pouvant avoir d’autre but que la recherche de la vérité. Si Durkheim s’est fait plaisir en s’opposant à certains croyances irrationnelles, nous sommes ravis pour lui, mais on ne peut pas dire qu’il l’a fait pour cela. De toute manière, le dire ne sert à rien, si ce n’est à créer chez l’auditeur de l’étonnement et de la distraction. Ce type de formulation étrange est récurrent dans le discours d’Ogien.
    3 – Albert Ogien affirme que l’accroissement du pouvoir d’achat de la population dans le monde capitaliste est voulu par les capitalistes, qui ont intérêt, pour vendre leur production, à fabriquer des consommateurs. C’est absurde. On n’imagine pas qu’un chef d’entreprise soit conduit à augmenter le salaire de ses employés pour que ceux-ci achètent ses produits à lui ! L’ouvrier qui produit des moissonneuse-batteuses ne les utilisera pas lui-même. Les mécanismes du capitalisme (le terme « libéralisme » est plus parlant sous cet aspect) ont pour caractéristique essentielle de n’être pas contrôlés par leurs acteurs. L’augmentation du niveau de vie des travailleurs a été le résultat de leurs luttes et non pas l’effet du bon vouloir des capitalistes.
    En résumé, Je n’aime pas la pose de ce bonhomme. Sa « musique » me rappelle celles de Bernard Stiegler ou de Michel Serres. Il semble plus préoccupé de cabotiner et faire le malin en proférant des paradoxes que d’expliciter clairement la substance de son bouquin, que je ne suis pas certain d’aller acheter aujourd’hui, même si la pluie cesse.
    Lorsque j’entends ce genre de personnes, c’est-à-dire des spécialistes qui font métier de comprendre mieux que nous, je me demande souvent s’ils sont conscients de vivre de notre ignorance et qu’ils ont intérêt à ne pas être clairs pour que cette ignorance perdure car elle est leur raison d’exister.

  4. Pierre BOUYSSET

    A quand un invité issu de PODEMOS pour nous conter la transition démocratique en directe ?

  5. Pierre BOUYSSET

    Cher Papriko, autorisez à monsieur OGIEN – comme à quiconque – un langage qui ne parvienne toujours à s’accorder à sa pensée. Sa parole, quant à elle, me paraît limpide.
    Pour reprendre l’un de vos exemples, vous avez noté qu’ »effet pervers » était inapproprié. Du fait de la logique du discours, vous compreniez que la langue – ou pensée spontanée – d’Albert OGIEN avaient simplement fourché, et qu’il fallait alors entendre a contrario « effet vertueux ».

    Ça arrive à tous.
    Judith BERNARD disait en début d’entrevue « efficace » à la place d’ »efficacité ». Mon enfant s’entête à dire « feu dentifrice » à la place de « feu d’artifice ».

    Je vous promets que le propos de monsieur OGIEN est parfaitement clair et cohérent (ou alors, du fait de ce que j’y ai entendu et n’aurais fait qu’imaginer, je me précipite pour écrire mon premier essai !). Je n’y ai vu nulles arrogance, dissimulation ou autre complot élitaire. Je vous invite vraiment à revisionner l’émission avec le même sens critique – à votre égard comme au sien – car elle vaut le coup. Je ne regrette pour part que ce ne fut parfois plus développé (sur cette fascinante expérience de PODEMOS notamment).

    Bienvenue, donc, aux bègues, ultra divergents, ultra convergents, obsessionnels et paranoïaques (…) dans cette DÉMOCRATIE à venir !

  6. MSC

    Quel dommage, Judith, que vous n’ayez pu vous laisser aller à votre envie de continuer à discuter de tout ça pendant 3 heures … Et merci pour les 85 minutes disponibles !
    C’est tellement riche qu’on voudrait souvent faire pause, et ajouter des questions, des remarques, faire préciser … ça durerait des heures.

    Pour revenir à Gramsci, il est réapparu dans l’entretien longtemps après avoir été mentionné explicitement : lorsque vous citez Badiou qui oppose « les mouvements » (disons comme ça) aux théories et aux théoriciens, les premiers étant supposément hermétiques aux seconds, on aurait envie de proposer à Albert Ogien la qualification des ces mouvements comme coalitions de subversivistes ; pas sur qu’il souscrive à l’idée, mais l’ironie vaut presque le coup à elle seule. (Je crois que Beppe Grillo a déjà été affublé du terme).

    Comme on l’a déjà dit de Gramsci, je pense qu’il faut le dire de Bourdieu : épinglons-le à souhait, mais ne lui faisons peut-être pas tout dire, et en particulier ce qu’il n’a sûrement pas écrit. Si, pour le béotien que je suis, sa théorie s’est surtout attachée à décrire comment les institutions se reproduisent (et ce qui se reproduit avec elles), je ne pense pas qu’il ait jamais considéré qu’elle ne pouvaient que se reproduire, sensiblement invariables ; ou me trompe-je ?

    Mais de Bourdieu on restera assez loin, et en particulier au moment d’aborder la question des médias, et l’idée général de la connivence, ou au moins de la complaisance avec les puissants. C’est probablement le seul point où AG ne développe pour ainsi dire aucune réflexion : c’est ainsi, en France (si Chomsky regarde …), apparemment inévitable (naturel ?), et c’est dommage mais heureusement des journalistes de Médiapart et d’ailleurs font différemment. Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’on ne verse pas dans le structuralisme.

    Tout ça nous amène à @si (sans malice), où l’on a pu voir, dans une émission récente, un membre de podemos côté Iglesias, nuancer la dichotomie telle qu’elle est présentée à la fois par Daniel Schneiderman dans son émission et par Judith dans la sienne : il y explique que la motion « verticale » d’Iglesias fera tout voter par tout le monde (le programme, les listes électorales, les alliances éventuelles, etc.), tandis que la motion « tirage au sort » prévoyait la mise en place des commissions hiérarchiquement étagées (l’ami de Podemos dit « des structures intermédiaires) qui dessinent aussi de la verticalité.

    Encore merci. Et juste : encore !

  7. MSC

    Merci beaucoup de nous avoir signalé cette vidéo, où les intervenants exposent des points de vue effectivement très intéressant sur le livre lui-même passionnant de Chantal Jaquet.

    Deux brèves remarques :
    1) on n’y verra rien, ou très peu, qui permette de penser la non-reproduction des institutions.
    2) si la réflexion conceptuelle qui y est développée peut être un appui pour suggérer, comme Judith le fait avec Albert Ogien, que la théorie de la reproduction de Bourdieu est dépassée, ce ne peut être qu’avec une acception très précise du mot « dépassé », et pas nécessairement celle qu’on entend le plus spontanément. Loin que le travail de Chantal rende celui de Bourdieu obsolète, on peut dire qu’elle le complète, l’augmente, et donc en un sens, oui, le dépasse. Un peu plus concrètement, et pour paraphraser Chantal Jaquet : l’habitus n’est pas rendu inopérant par la complexion, mais bien plutôt englobé par elle.

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