Théâtre populaire, Femme savante

avec Diane SCOTT
publiée le
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animée par Laura RAIM

La critique Diane Scott vient de soutenir sa thèse, « Théâtre du Peuple, critique de la culture ». Sa réflexion pointue m’a passionnée, j’ai voulu la partager. Les raisonnements sont par moment complexes, mais ça vaut le coup de s’accrocher.

Elle part d’un paradoxe : à l’ère du néolibéralisme gestionnaire qui se tient à distance de tout projet d’émancipation égalitaire et se méfie des « excès de la démocratie », c’est à la culture en général et au théâtre en particulier que l’on demande d’être démocratique, égalitaire, émancipateur et populaire. « La meilleure réponse au Front National, c’est le théâtre, » proclame par exemple le directeur du Théâtre du Rond Point en 2002. C’est dire si l’époque attend beaucoup du théâtre. La droite s’empressera de désigner « crise de la culture » la difficulté à remplir cette mission impossible, « crise » bien utile pour justifier le désengagement croissant de l’Etat.

Diane Scott analyse ici les différentes ambitions du théâtre dit « du peuple » : accueillir, armer et faire advenir le peuple. Elle déconstruit aussi bien le discours sur la « crise de la culture » que le fantasme d’une culture « populaire » passée, vierge de toute distinction entre culture savante et culture populaire. Refusant le piège de l’injonction à produire un théâtre émancipateur, Diane Scott ne renonce pas pour autant à penser un théâtre qui tienne ensemble art et politique.

Son site : lescorpssecrets.fr
Sa Revue : Revue Incise

 

Durée 60 min.

3 réponses à “Théâtre populaire, Femme savante”

  1. Abracadabra

    La thèse des vases communicants est réjouissante car elle explose un certain nombre d’idées toute faites, et nous oblige à repenser les rapports entre culture et politique. Je vois néanmoins quelques difficultés, d’abord d’ordre chronologique, à associer directement cette corrélation [entre dépolitisation de la politique et surinvestissement politique du théâtre (plus largement de la culture)] au néolibéralisme des années 80. En effet l’insistance au cours de la discussion sur les années Thatcher ou sur les différences entre un Mitterrand et un Sarkozy donnent l’impression d’un tournant historique à cette époque-là, alors que certaines descriptions et définitions paraissent brosser les effets d’une tendance plus ancienne. Je suppose qu’il y a accélération à cause du courant gestionnaire, ou point de bascule, mais ce point n’est pas très clair pour moi.

    Evidemment l’objection majeure à cette thèse est celle du caractère (supposément) intrinsèquement politique de l’art théâtral, avec le développement concommittant de la démocratie et de la tragédie à Athènes. C’est ce que nombre d’hellénistes ne cessent de répéter (Jacqueline de Romilly par exemple), mais, après tout, il y a là peut-être un biais qu’il est sain de questionner. La figure de Périclès ne fait pas l’unanimité, et par conséquent, la thèse évoquée s’en trouverait renforcée.

    En tout cas, Diane Scott se défend certes d’être historienne, mais il serait intéressant de voir si l’on ne pourrait pas vérifier ce caractère connexe à d’autres moments de l’Histoire (je pense par exemple au grand Siècle et notre théâtre classique). Merci encore pour cette émission.

  2. Totorugo

    Waouh !!! Quelle émission, et surtout, quelle invitée ! Merci Laura, d’avoir conduit cet entretien.

    J’ignorais jusqu’au nom de Diane Scott, mais son discours est limpide de part en part, sa parole est précise, subtile, coupante et sans fard (pas de jargon insupportable), et d’une exigence intellectuelle qu’on ne rencontre pas souvent. Ça fait un bien fou, et c’est très stimulant, même quand on est (ce qui est mon cas) peu instruit de la question théâtrale.

    Y a-t-il un moyen de consulter en ligne la thèse de Diane Scott ? Ou alors sera-t-elle publiée prochainement ?

  3. gomine

    DIane Scott est passionnante et sa langue est très belle, même si (et peut-être parce qu’) elle demande une extrême attention
    (la tentation, souvent, de faire « pause » pour reprendre mon souffle et bien m’assurer que j’ai tout compris),
    mais la pensée est limpide,
    elle parle, j’imagine, comme elle écrit, son lexique n’est pas celui ordinairement employé par les bavards,
    c’est inhabituel de nos jours mais c’est précieux (dans tous les sens du terme),
    les petits sourires échangés qui ponctuent l’entretien sont de vraies respirations,
    merci pour cet échange et rencontre !

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