To vote or not to vote
Aux Sources
Antoine Buéno
J'ai toujours beaucoup aimé aller voter. D'abord parce que ça me permettait d'entrer dans une école maternelle. J'adore aller renifler l'odeur des écoles maternelles, et comme ce fut pendant lontemps la seule occasion que j'avais d'y aller, je ne m'en privais pas. Et puis j'aime bien le dispositif : les isoloirs, les bulletins, l'urne enfin, bref le cérémonial citoyen et la certitude que j'accomplissais quelque chose de grand, que je mettais mes pas dans ceux dont le bulletin avait changé le monde ! Et puis surtout, j'aime le sentiment de communion, de l'action collective : un peu comme Noël ou les matches de foot : l'idée que tout le monde fasse la même chose au même moment, ça me met des frissons.
Et puis petit à petit, ni l'odeur de la colle et de la salle de classe, ni la chair de poule de la grand messe républicaine n'ont plus suffi à me motiver pour aller glisser la petite enveloppe dans la fente. C'était terrible : je devenais abstentionniste. Je ne me souviens plus très bien de quand ça a commencé (mais je ne me souviens pas non plus de la dernière fois que j'ai voté avec enthousiasme). J'ai fait quelques rechutes mais globalement l'idée de participer à tout ce cirque est devenue difficilement supportable. J'avais un peu honte quand même et les clips de propagande électorale se chargeaient de me rappeler à quel point j'étais une mauvaise citoyenne.
J'ai depuis lu et entendu suffisamment d'arguments pour me convaincre que, dans l'état actuel du fonctionnement de nos institutions, il était très peu problable que mon vote change quoi que ce soit à la marche du monde et à son déluge d'injustices. Je sais aussi que je ne vis pas en Corée du Nord et que la France est un pays merveilleux avec un Canard enchaîné et tout et tout. Mais pourtant, je n'arrive toujours pas à répondre à cette question simple : qu'est ce qui est le plus nocif : voter ou ne pas voter?
Le livre d'Antoine Buéno entend y répondre. Il donne aux abstentionnistes convaincus ou aux hésitants, des arguments, souvent imparables (mais pas toujours), pour ne pas aller donner leur voix à ceux qui, régulièrement et avec souvent une absence totale de vergogne, viennent nous expliquer qu'avec eux, ça sera différent.
Il propose surtout de faire des abstentionnistes un mouvement unifié, structuré, un lobby en quelque sorte, capable d'aller négocier ses voix contre la garantie de voir ses revendications prises en compte. Cela pose un tas de problèmes pratiques et politiques mais c'est une propostion qui a le mérite d'exister.
En attendant d'y réfléchir, je vous souhaite à tous et à toutes beaucoup de courage pour les mois à venir!