Et si la « prise de conscience » n’était pas le problème ? On a parfois l’impression que si les gens en général, et les décideurs en particulier, comprenaient « vraiment » la gravité de la catastrophe écologique en cours, ils agiraient en conséquence, et voteraient enfin les lois nécessaires pour mettre fin aux fonctionnements économiques qui nous conduisent tout droit au désastre. Les Révoltes du Ciel, Une histoire du changent climatique XVe-XXe siècle, (Seuil, 2020), brise méthodiquement cette illusion.

Les historiens Jean-Baptiste Fressoz et Fabien Locher montrent que les savants, hommes d’Etat, historiens, colons, agriculteurs et ingénieurs européens ont débattu, dès le début de l’époque moderne, de l’action humaine sur le climat. Or cette préoccupation a toujours été politisée et instrumentalisée, que ce soit pour légitimer la colonisation présentée comme seule à même de « tempérer » les climats extrêmes, ou pour discipliner les usages populaires de la nature, et notamment de la forêt, et renforcer le droit de la propriété privée.

Dès lors que nos ancêtres savent depuis longtemps que l’activité humaine agit sur, et potentiellement dérègle, le climat, la question des auteurs n’est pas d’identifier l’origine d’une conscience écologique mais plutôt l’inverse : « la fabrication industrielle et scientifique d’une forme d’apathie. »

Laura RAIM